• ODYSSEE

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    ODYSSÉE

    Camille PRIOUL

     

    Personnages

     

    Ce spectacle met en scène plus d’une trentaine de personnages, y compris plusieurs foules, des vivants, des morts, et même un bélier. En voici les principaux, par ordre d’apparition.

    Zeus

    Il est le dieu du ciel et de la foudre, le chef de tous les dieux et le père de nombre d’entre eux. Juste et protecteur, mais aussi colérique et jaloux, il règne sur le monde depuis l’Olympe et gère la bande des dieux et leurs conflits comme une petite entreprise.

    Athéna

    Jeune déesse de la sagesse, des artistes et artisans, bref de tous ceux qui aiment réfléchir avant d’agir, elle a toujours eu un faible pour Ulysse dont la force première reste la ruse. C’est elle qui, la première, insistera pour que le héros puisse rentrer chez lui, et elle l’accompagnera lors de nombreuses étapes de son Odyssée.

    Ulysse

    Il est le héros de l’Odyssée. Après dix ans de guerre à Troie et une autre dizaine à tenter de rentrer chez lui malgré le dieu Poséidon qui a juré sa perte, il est enfin libéré de Calypso qui le retenait prisonnier depuis des années. Sur la route qui le ramène vers sa femme Pénélope et son fils Télémaque, il raconte ses aventures à ses hôtes.

    Calypso

    Nymphe de la mer, Calypso recueille Ulysse après le naufrage qui coûtera la vie à tout son équipage. Tombée amoureuse de lui, elle le retiendra prisonnier pendant sept ans en échange de la promesse de le rendre immortel. Peine perdue, celle qu’Ulysse aime c’est sa Pénélope.

    Hermès

    Dieu des commerçants, des voyageurs et des voleurs, il est aussi et surtout dans notre histoire le messager des dieux. C’est lui qui viendra annoncer à Calypso la décision de Zeus de renvoyer Ulysse chez lui. Un peu surmené, il aurait bien besoin de prendre quelques vacances.

    Alkinoos

    Père de Nausicaa, il est le roi des Phéaciens. Il accueille Ulysse lors de son voyage de retour et organise de grandes festivités en l’honneur de l’étranger. Touché par ces attentions et la chanson de Démodocos l’aède, qui raconte ses aventures sans le savoir, Ulysse dévoilera son identité et racontera ses dix dernières années d’errance.

    Polyphème

    Géant, avec un seul œil au milieu du front, Polyphème est un cyclope vivant seul dans sa grotte avec ses troupeaux de brebis. Plutôt idiot, il se fera berner par Ulysse ; son père Poséidon jurera ensuite que le héros ne reverrait jamais son pays ni sa femme.

    Euryloque

    Beau-frère d’Ulysse, il est aussi son bras droit dans les aventures. Légèrement plus futé que le reste des compagnons, il est d’un naturel ronchon et a une élocution bien à lui. Il doit souvent faire le pont entre leurs camarades et un Ulysse désabusé.

    Circé

    Magicienne puissante, elle est parfois déesse, parfois sorcière. Lors du passage d’Ulysse sur son île, elle transformera ses compagnons en cochons. Ce n’est que grâce à l’intervention d’Hermès qu’il parviendra à les délivrer. Ils resteront ensuite toute une année chez elle à se reposer.

    Tirésias

    Célèbre devin, il repose aux enfers depuis sa mort et il ronchonne régulièrement, en compagnie d’autres défunts célèbres. Ulysse devra lui rendre visite sur les indications de Circé afin de se renseigner sur comment rentrer enfin chez lui.

    Télémaque

    Il est le fils d’Ulysse et règne sur l’île d’Ithaque en attendant le retour de son père. Après l’intervention d’Athéna auprès de Zeus pour plaider en faveur d’Ulysse, elle accompagnera Télémaque dans un long voyage à sa recherche.

    Antinoos

    Il est le chef des nombreux prétendants de Pénélope et occupe la grande salle du palais d’Ithaque depuis des années avec ses semblables. Persuadé d’obtenir un jour où l’autre la main de la reine, il se conduit comme s’il était déjà sur le trône et accueillera bien mal Ulysse à son retour.

    Euryclée

    Ancienne nourrice d’Ulysse, elle est aujourd’hui très âgée mais toujours au service de sa famille et notamment de Pénélope. C’est elle la première qui reconnaîtra celui dont elle s’est tant occupée durant des années, grâce à sa cicatrice.

    Pénélope

    Femme d’Ulysse, elle attend désespérément son retour depuis vingt ans. Ne pouvant pas repousser définitivement les prétendants, elle leur fera croire des années durant qu’elle doit avant tout mariage tisser un linceul pour le père d’Ulysse ; elle passera ses nuits a détisser son travail de la journée afin que le moment du choix ne vienne jamais.

     

     

    1 – Introduction

     

    AÈDE – Au fond, si on y pense, toute cette histoire a commencé à cause d’une pomme. Une pomme d’or, dont certains disent qu’il s’agissait en fait d’une orange, car il faut toujours qu’il y ait des gens pour tout savoir mieux que tout le monde.

    Ce jour-là, chacun était invité à se réunir sur l’Olympe pour des noces, immortel ou non. La seule à n’avoir pas reçu son carton d’invitation était Éris, déesse de la discorde. Parce qu’elle n’était pas très sympathique. Pourquoi inviter une personne désobligeante qui va faire des commentaires sur la tenue de la mariée, baratiner les serveurs de manière outrancière et gâcher le toast du témoin ?

    Vexée, cette harpie a jeté en plein milieu des festivités une pomme d’or pour la plus belle. Trois déesses, Héra, Athéna et Aphrodite, ont revendiqué le fruit et se sont écharpées entre les tables du banquet comme des demoiselles d’honneur éméchées autour du bouquet de la mariée. Sans résultat.

    Zeus a alors demandé à Pâris, jeune prince de Troie qui n’avait absolument rien demandé à personne et gardait tranquillement ses moutons sur le mont Ida, de trancher la question. Preuve qu’on peut être la déesse de l’amour et de la sexualité et avoir tout de même des problèmes de confiance en soi, Aphrodite lui promit l’amour de la plus belle femme du monde s’il la choisissait. Ce qu’il fit.

    Prétextant d’aller prendre des nouvelles d’une vague tante, Pâris s’en fut alors enlever Hélène. Mais la plus belle femme du monde était déjà mariée à Ménélas, roi de Sparte, qui ne l’a pas bien pris du tout. Il a appelé tous ses copains et est partis à Troie récupérer sa femme et laver son honneur.

    Cette guerre d’égo, qui devait se régler en quelques semaines la fleur à la lance, dura 10 ans. Jusqu’à ce que, lorsqu’il ne restât plus grand monde à tuer de chaque côté, les Achéens fissent tomber la ville.

    Certains sont alors rentrés chez eux, d’autres sont décédés sur le chemin du retour. L’un d’entre eux erra dix années de plus avant que les dieux ne s’intéressent de nouveau à lui…

     

    2 – L’Assemblée des Dieux

     

    Zeus feuillette le journal, à la table du petit-déjeuner. Il boit son café.

    ZEUS - « Affaire Egiste contre Agamemnon : la défense invoque une clause divine ». Haha, ben elle est pas mal celle-là ! « Toutes nos révélations sur le cabinet noir piloté depuis l’Olympe. » Quoi ? Mais ça va pas non ? « L’accusé se défend : « Je ne voulais pas le faire, ce sont les dieux qui m’ont forcé ». Non mais t’es sérieux là ?! Pour qui ils se prennent ces mortels ? Incapables d’assumer leurs actes, dès qu’ils font une bêtise il faut toujours que ça soit notre faute ! C’est trop facile ! Je vais l’écraser, je vais le foudroyer, je vais me transformer en aigle pour séduire sa femme, je vais…

    ATHÉNA – Calme-toi Papa ! C’est comme ça depuis l’aube des temps, pourquoi voudrais-tu que ça change ?

    ZEUS – Et alors ? C’est se moquer de nous, nom de moi ! C’est pas comme s’ils n’étaient pas prévenus, quand même ! Tu verras Athéna, si on ne serre pas la vis très vite ils vont finir par se trouver de nouveaux dieux. Pire, ils pourraient même arrêter de croire ! On aurait l’air malin, tiens ! Bon, qu’est-ce que tu voulais, mon petit choupitou ?

    ATHÉNA – Et bien je voulais te parler. Tu te souviens d’Ulysse ? Ulysse aux mille ruses ? Un guerrier, malin… Plutôt beau mec ? Tonton Poséidon l’empêche de rentrer chez lui, tout ça à cause d’un cyclope ou je sais pas quoi, mais en vrai je suis sûr que c’est parce qu’il est vexé contre moi à cause de cette histoire d’olivier, à Athènes. Mais si ! Les athéniens ne savaient pas s’ils devaient appeler la ville Athènes ou Poséidie parce qu’ils nous aimaient bien tous les deux. Du coup ils nous ont demandé des cadeaux. Alors lui il s’est pas foulé, comme d’habitude, il a offert de l’eau salée, à dix bornes de la mer il faut avouer que c’est pas très malin, et moi je leur ai offert un olivier. Pour qu’ils aient à manger, quoi !

    Bref, c’est moi qu’ils ont choisie et depuis il boude, et vu qu’il sait que j’aime bien Ulysse et qu’on se voit de temps en temps, il l’empêche de rentrer chez lui. Il est prisonnier sur l’île de la nymphe Calypso.

    ZEUS – Ulysse ! Ah oui, Ulysse… Bon gars ça. Respectueux. Tiens, si tous les mortels étaient comme lui, on serait vachement moins embêtés ! De toute façon ton oncle a toujours eu un caractère de cochon. Et alors qu’est-ce que ça change pour toi, tu veux qu’il rentre ? C’est ça ?

    ATHÉNA – Ça fait vingt ans qu’il est parti. Il t’a toujours été fidèle, pendant la guerre il a sacrifié des troupeaux entiers en ton nom ! C’en était même honteux, toute cette viande gâchée…

    ZEUS – Mouais, bon… Je vais parler à Poséidon…

    ATHÉNA – Oh merci mon papa chéri, merci merci merci !

    Elle l’embrasse. Zeus la repousse.

    ZEUS – Oui, ben calme-toi ! Un peu de retenue quand même ! Tu es la déesse de la sagesse, pas celle de la puberté ! Et d’ailleurs, pourquoi il t’intéresse autant ? C’est qu’un mortel après tout.

    ATHÉNA – Je sais pas, je l’aime bien. Il me touche ! Il aime toujours sa femme alors que ça fait bientôt vingts ans qu’il ne l’a pas vue. C’est beau non ? Moi je trouve ça beau… Hein ? Hein ? Hein, mon papa ? Hein dis ?

    ZEUS – Oui, oui ! Oui c’est beau. Bon, ben, j’envoie Hermès le prévenir.

    ATHÉNA – Merci mon papa, merci merci ! Et moi je vais aller voir son fils Télémaque pour lui rappeler qu’en l’absence de son père, c’est lui qui commande et pas tous ces prétendants qui veulent épouser sa mère et qui pillent ses vivres et son héritage depuis des années. Et je l’enverrai à Pylos, tiens, et puis à Sparte, prendre des nouvelles de son père, et puis…

    Elle sort en tourbillonnant. Son père la regarde partir.

    ZEUS – Ouais, ben fais pas n’importe quoi avec le gamin quand même ! Athéna ! Bon, ben, au boulot.

    Il fait le tour de la pièce, ouvre une porte, se retrouve au bureau.

    ZEUS – Bonjour, bonjour. Si on me demande aujourd’hui, je suis en réunion toute la journée. Ça vaut pour tout le monde. Gladys, mon petit, vous me sortirez le dossier d’Ulysse s’il vous plaît.

    Il s’installe, soupire, puis décroche le téléphone et compose un numéro.

    ZEUS – Oui bonjour, j’aimerais parler à Poséidon s’il vous plaît. De la part de Zeus. Ben Zeus… Zeus, quoi. ZEUS ! Le chef des dieux ! Bon dites-lui que son frère veut lui parler. Mais oui maintenant ! C’est pas possible ça...

    Allô ? Posé ? Oui, c’est Zeus là. Dis-moi c’est pas une lumière ton assistant j’ai l’impression. Ah oui d’accord, non je sais ce que c’est, moi aussi j’ai des gosses partout et je sais plus quoi en faire. Non, officiellement je suis calmé là. Ben quand t’es marié à la déesse du mariage à un moment faut filer droit, hein. Enfin tu me connais, je lui dis pas tout quoi…

    Bon, qu’est-ce que je voulais dire ? Ah oui, tu te souviens d’Ulysse ? Un grand, là, futé, pas vu depuis un moment ? Oui, ben on va le renvoyer chez lui là. De quoi ? Attends, attends, Posé, calme toi, pas si vite ! Comment ça crevé un œil ? Ah bon ?! Mais à quel fils ? Polyphème ? Mais c’est même pas un enfant légitime Polyphème ! Ah bah non, enfin Posé, tu vas quand même pas essayer de me faire croire qu’un grand machin comme ça avec un seul œil au milieu du front c’est un enfant légitime ! Mais si je l’ai rencontré ! Voilà, c’est ça, au mariage des deux idiots, là. Avec la pomme, c’est ça. Quel bazar cette histoire aussi…

    Bon bref, j’ai promis à Athéna, tu sais comment elle est quand elle a une idée quelque part… Ah ben c’est pas mal ça ! Ah si, si, c’est super ! Tu sais quoi ? On dit qu’on fait comme ça : on dit qu’on fait comme ça. On le renvoie chez lui mais il se débrouille pour rentrer. Allez, super, je te remercie. Je te laisse alors, hein. Allez salut. Oh, attends, attends ! Posé ? Tu viens pour les Dionysies ? Ça ferait plaisir à maman. Ah super, ça marche. Allez, bisous à Amphitrite.

    Il raccroche.

     

    3 – La grotte de Calypso

     

    Calypso tisse en chantant.

    CALYPSO – A qui veut casquer, pour un prix modique

    Je promets de faire et sans nul chiqué

    Un travail soigné, tiré du classique

    Pour un prix modique, à qui veut casquer…

    Pour une p’tite obole, la main dans la poche

    Et sous l’œil du garde qui me r’garde en d’sous…

    Elle s’interrompt et relève la tête.

    CALYPSO – Bonjour Hermès. Et ben, entre, reste pas dehors les bras ballants comme un nez qui coule ! Évidemment que je t’ai reconnu. Je suis chez moi, ici. Je connais le murmure des vagues, le chant des oiseaux et le vent dans les arbres. (Elle se lève et va vers lui). Je sais le bourdonnement des insectes et le goût de l’orage qui ne gronde pas encore. En ce qui te concerne, c’est surtout que tu pues la sueur.

    HERMÈS – Désolé Calypso. Je suis venu directement de l’Olympe, et mes sandales sont tombées en panne, j’ai dû changer des plumes. Et puis j’arrivais pas à remettre la main sur mon bâton avec les serpents, de toute façon ils passent leur temps à essayer de me chiquer, et puis…

    CALYPSO – Oui oui, d’accord. Tu peux me dire ce que tu fais là ?

    HERMÈS – Et bien… Zeus a décidé que tu devais laisser partir ton petit protégé. Le laisser rentrer chez lui, quoi. Je suis désolé, c’est Athéna qui lui a demandé, tu sais comment il est avec elle, il ne lui refuse jamais rien.

    CALYPSO – Athéna ? Cette petite peste m’a toujours détestée de toute façon ! J’ai combien de temps ?

    HERMÈS – Juste le temps de lui dire au revoir…

    Calypso s’assoit, abattue.

    CALYPSO – Et mince… il va me manquer, tu sais. Je me suis attachée à lui, tu me connais, sentimentale comme je suis… C’est vraiment un type bien, pour un mortel. Enfin, c’est probablement mieux comme ça. Pour lui, je veux dire. J’ai l’impression qu’il ne se plaît plus ici. Il passe ses journées à pigner sur la plage comme une gamine en début de colo, et le soir je suis obligée de le forcer pour qu’il veuille de moi ! Au début c’était un amant phénoménal, mais apparemment Monsieur n’a plus envie !

    Elle se relève pour exposer son physique à Hermès.

    Avec le corps que j’ai, tu te rends compte ?! Regarde-moi ça. Souple, énergique, la sensualité incarnée ! Je suis une nymphe, bon sang de bon soir !

    HERMÈS – Il veut rentrer. Il a une femme, tu sais.

    CALYPSO – Oui, je sais ! La merveilleuse Pénélope ! Et bien je suis désolée mais j’achète pas. Ça n’existe pas une femme aussi parfaite, c’est impossible.

    HERMÈS – Il semblerait pourtant qu’elle soit aussi vertueuse que ce qu’on…

    Hermès lève sa main pour se protéger. Calypso a sa main levée, prête à frapper. Un temps. Elle baisse sa main, résignée.

    CALYPSO – Qu’est-ce que je peux y faire, de toute façon? Je vais le voir pour lui annoncer. Je te préviens, quand je reviendrai je ne serai pas de bonne humeur. Si tu es encore là, je te fais la misère.

    HERMÈS – Une autre fois, merci.

    CALYPSO – Adieu.

    Calypso va rejoindre Ulysse sur la plage.

    CALYPSO – Je ne peux tout de même pas lui avouer que c’est Zeus qui m’oblige à le renvoyer cher lui … Je vais avoir l’air de quoi moi ? Et regardez-moi cette loque, à chigner à tout bout de champ ! Ulysse ? Ulysse ! Relève-toi, idiot !

    Ulysse se lève et se retourne, surpris. Il s’essuie les yeux, geignard.

    ULYSSE – Qu’est-ce que tu me veux ?

    CALYPSO – Allez viens Ulysse, installe-toi, j’ai à te parler. Bon alors voilà, j’ai bien réfléchi, et j’ai décidé que tu pouvais partir. Je sens bien que tu n’es pas heureux ici, alors voilà, tu peux t’en aller…

    Il lui baise les mains, à genoux.

    ULYSSE – Je peux partir ? C’est vrai ? Oh merci, merci Calypso, c’est vraiment le plus beau jour de ma vie !

    Elle dégage sa main, vexée.

    CALYPSO – Ouais, c’est ça, ouais ! Sympa… Mais oui, vas-y, pars. Construis-toi un radeau ou ce que tu veux, je m’en fiche, je te donnerai des provisions et je me débrouillerai pour que le vent te porte jusque chez toi. Mais en échange, réponds-moi : comment, Ulysse, comment ta Pénélope, après bientôt vingt ans sans la voir, après sept ans à mes côtés… A MES côtés ! Comment est-ce qu’elle peut rivaliser avec moi ? Je t’ai offert l’immortalité si tu restais ici en ma compagnie, et tu me la refuses pour cette… vieille femme ?

    ULYSSE – Tu ne comprendrais pas. Je le sais bien, que Pénélope n’est pas aussi éblouissante que toi. Mais c’est parce que nous sommes mortels. Parce que je suis à elle, et qu’elle est à moi. Et nous, nous n’avons qu’une seule vie pour être réunis.

    Calypso se lève.

    CALYPSO – Effectivement tu as raison, je ne comprends pas… Enfin, tu ferais mieux de te mettre au boulot.

    Elle sort. Noir.

     

    4 – Le palais d’Alkinoos

     

    ALKINOOS – Chers amis, Étranger, levons ensemble nos verres à la santé de Zeus le Brandisseur de Foudre, qui t’a amené jusqu’ici. (Il boit) Mange, étranger. Cette table est la tienne tant que tu resteras parmi nous. Et dès demain, nous te raccompagnerons chez toi.

    ULYSSE – Merci Alkinoos ô roi. Et merci à toi aussi, ô Reine. J’espère pouvoir un jour vous remercier comme il convient.

    ALKINOOS – Je t’en prie, Étranger. Nous feras-tu le plaisir de nous raconter qui tu es et comment tu t’es naufragé sur nos côtes ?

    ULYSSE – C’est une longue histoire. Mais puisque tu me la demandes… Alors que je rentrais chez moi il y a bien longtemps, Zeus a frappé mon navire et noyé tous mes camarades.

    Ulysse boit à l’évocation de ce souvenir douloureux.

    J’ai dérivé neuf jours, accroché à des décombres du bateau, jusqu’à une île isolée de tout. C’est là qu’habite la déesse Calypso, fille du titan Atlas. Elle m’a recueilli, soigné et m’a promis de faire de moi un immortel si je restais à ses côtés. Je crois qu’elle se sentait seule. J’y suis resté sept ans. Sept longues années pendant lesquelles je n’ai pensé qu’à une chose : retrouver mon pays et ma femme. Et puis il y a une vingtaine de jours, elle est venue me trouver sur la plage. J’étais en train de… de faire de l’exercice…

    Je ne sais pas ce qui l’a faite changer d’avis, mais elle m’a libéré. Alors j’ai fabriqué un radeau et je suis parti. En approchant de vos côtes, une autre tempête m’a naufragé. (Il boit à nouveau) Parce qu’apparemment ma vie se résume à ça : tempêtes et captivité chez des nymphomanes immortelles. Non parce qu’avant elle il y en a eu une autre ! Bref j’ai trouvé un abri dans des broussailles et au petit matin, c’est ta fille Nausicaa qui m’a réveillé. Elle m’a conseillé de venir te voir, elle a été vraiment très sympa.

    ALKINOOS – Ah, je reconnais bien là notre petite Nausicaa ! Douce et prévenante, n’est-ce pas ? Mais pourquoi ne t’a-t-elle pas raccompagné elle-même avec ses servantes ?

    ULYSSE – Eh bien, elle me l’a proposé, mais j’ai refusé. Pour qu’elle ne soit pas vue avec un homme, tu comprends ?

    ALKINOOS – Tu es un homme bon, étranger, tu es un homme bon… Si tu restais, elle pourrait être ta femme ! Tu obtiendrais mes richesses, mon palais, tout Phéacie !

    ULYSSE – Eh oui ! Et merci pour ta prévenance Alkinoos, ô roi, mais – et je ne sais pas pourquoi tout le monde a l’ai de l’oublier… - j’ai déjà un pays et une femme. Et je ne souhaite rien de plus que les retrouver. Et puis, entre nous...C’est-à-dire que Nausicaa a quatorze ans, tout de même !

    ALKINOOS – Oui, pardon, pardon ! C’est juste que je pense beaucoup à son avenir, quoi…

    ULYSSE – Oui d’accord, mais alors moi ça me met très, très mal à l’aise en fait !

    ALKINOOS – Pardon ! Pardon, je ne recommencerai plus !

    ULYSSE – Voilà, merci !

    ALKINOOS – Ahaha…

    ULYSSE – Ahaha…

    Ils rient ensemble, plutôt jaune… Puis avec un enthousiasme un peu poussé.

    ALKINOOS – Ahem, tiens, euh, étranger, si on mettait un peu de musique ? Je te présente Démodocos, l’aède le plus célèbre de tout le pays.

    DEMODOCOS – Okay ! Salut les Phéaciens, ça me fait plaisir de vous retrouver ! Comment ça va ? J’ai dit est-ce que ça va ? Okay ! Alors on commence avec un bon vieux classique parce que je sais que vous aimez ça. Elle s’appelle Prudence et Bravoure…

     

    5 – La Chanson de Démodocos

     

    DEMODOCOS -

    Ils n’étaient pas amis, ni ennemis non plus

    Ils avaient bien été rivaux mais ils n’en parlaient plus

    Avant tout camarades, ils étaient dans le même camp

    Mais bien que frères d’armes tout les opposait pourtant

    L’un ét ait un colosse, pas vraiment imbécile

    Pas franchement Socrate non plus, il s’appelait Achille

    Baigné dans les eaux du Styx aux enfers étant garçon

    Il était invulnérable, n’eut été d’un arpion

    L’autre avait bien aussi sa part de force destructrice

    Quoiqu’il misait tout sur la ruse, on l’appelait Ulysse

    Futé et insolent, il préférait s’armer

    D’idées, de mots, de stratagèmes plutôt qu’épée

    C’est sur l’île de Lesnos que nos deux compagnons

    Au cours d’un banquet, faillirent en venir aux gnons

    Devant l’armée grecque réunie, tour à tour

    L’un célébrait Prudence, et l’autre louait Bravoure

    Incapables de se convaincre, ils quittèrent la partie

    Se promettant l’un l’autre qu’un jour ils seraient séduits

    Puis ils partirent au front mener le long siège de Troie

    Oublier leur querelle dans le sang et les combats

    Au bout de dix ans, tant de frères furent tombés

    Que plus personne n’imaginait voir cette guerre s’achever

    Achille détenait le record d’ennemis occis

    Ulysse cherchait encore une issue à cette boucherie

    Un matin une flèche par Pâris décochée

    Cueillit Achille à la cheville, on le vit s’effondrer

    Les combats cessèrent dans un silence tendu

    Et on pleura pendant des jours le héros disparu

    Privée de sa légende, de son plus grand guerrier

    L’armée d’Agamemnon semblait désemparée

    Quand une voix s’éleva, c’était celle d’Ulysse

    Qui laissa parler la ruse, fit un nouvel artifice

    Il imagina un immense cheval tout fait de bois

    Offert en signe de paix à la ville de Troie

    Qui ravie que cette guerre de dix ans soit finie

    Accepta le présent et fêta toute la nuit

    La cité d’Ilion signa ainsi la défaite

    Portant entre ses murs l’origine de sa perte

    Dans les flancs du cheval une armée attendait fébrile

    L’heure de conquérir enfin cette ville indocile

    Le soleil se leva sur les cendres et la fumée

    Sans vraiment se défendre, Troie était tombée

    Ville mise à sac, hommes abattus, femmes enlevées

    De cette épreuve jamais elle ne put se relever

    La dépouille d’Achille y resta pour toujours

    Ulysse jamais à Ithaque ne fut de retour

    La querelle de Lesnos avait trouvé sa conclusion

    Bravoure et prudence ne peuvent être que de front

    Elles n’étaient pas amies, ni ennemies non plus

    Aujourd’hui Prudence et Bravoure ont toutes deux disparu

    Personne ne les a depuis jamais revues

    Bravoure et Prudence ont toutes les deux disparu (x3)

    Merci, c’était Démodocos ! Allez on se retrouve après le dessert, je serai à la sortie pour dédicacer de petites tablettes de cire !

     

    6 – Les aveux d’Ulysse

     

    ALKINOOS – Aaaaaaah, génial, il est génial ! Je l’adore ! Hein Arété, qu’on l’adore ? Des fois on le fait chanter juste comme ça, pour égayer la maison. On le met dans une piaule, on n’est même pas là pour l’écouter mais ça nous fait marrer ! Bon, d’habitude il chante des trucs un peu barbants, des balades sur les fleurs, la mer, la montagne, tout ça. Mais ça ça c’est vraiment… (A la reine Arété) Quoi ? (A Ulysse) Étranger… Tu… Tu pleures ? Je suis désolé. Je ne pensais pas que ça te mettrait dans un tel état.

    ULYSSE – Ce n’est rien, pardon. C’est la chanson…

    ALKINOOS – Étranger, demain tu vas poser le pied pour la première fois sur un bateau phéacien et partir pour ton voyage de retour. Nos navires ne sont pas seulement les plus sûrs, ils sont doués de raison. Ils savent lire les hommes comme la mer et voguent d’eux-mêmes vers leur destination, sans crainte des brumes ni des tempêtes.

    Ulysse boit et geint.

    ULYSSE – Des tempêtes … ?

    ALKINOOS – Depuis que nous naviguons, nous narguons Poséidon et ses colères. Et cela ne durera pas…

    ULYSSE – Parce que … ?

    ALKINOOS – Parce que …je le sais !

    ULYSSE – Ben vas-y je t 'écoute !

    ALKINOOS : Mon père me l’a annoncé sur son lit de mort.

    ULYSSE - Mais parle, enfin ! Tu commences à me faire flipper là !

    ALKINOOS -Un jour, un de nos bateaux reviendra de raccompagner un hôte, et Poséidon le détruira , perdant tous les hommes à son bord.

    ULYSSE- C’est pas bon ça non ?!

    ALKINOOS - C’est peut-être de toi qu’il s’agit.

    ULYSSE- Sérieux !

    ALKINOOS- A tout prendre, je préfère encore que cela toi plutôt qu’un autre.

    ULYSSE- Mais pourquoi ? Pourquoi moi ? Pourquoi toujours moi ?

    ALKINOOS- Mais pour ce prix que nous sommes prêts à payer, partage ta peine et dis-nous qui tu es. D’où viens-tu, qu’as-tu vu de ce monde ? Et surtout , pourquoi pleurer pour cette chanson ?

    Ulysse soupire.

    ULYSSE- Tu as raison Alkinoos, je ne veux pas passer pour un ingrat ; et puis il faudra bien aussi que tu saches où je dois me rendre...Si je pleure quand d’autres chantent, c’est parce que ce banquet , j’y étais (il se lève) ; c’est parce que que j’ai combattu avec Agamemnon, Achille, Patrocle ; c’est parce que ce cheval de bois était mon idée et que j’étais caché à l’intérieur avec mes hommes. Je suis Ulysse , fils de Laërte et roi d’Ithaque.

    ALKINOOS - Ulysse ? C’est vraiment toi ? Mais par tous les dieux , tout le monde te croit mort !

    ULYSSE- J’ai bien cru que j’allais mourir, et plusieurs fois ! Je l’ai même souvent souhaité… Maintenant puisque tu me le demandes, je vais te raconter mes dix dernières années, depuis que j’ai quitté Troie. Installe toi Alkinoos, car tu n’es pas au bout de tes peines…

    Après le sac de Troie, nous étions tous ivres de la victoire, ivres de joie, et puis ivres tout court...Pour ceux d’entre nous qui avaient participé aux deux expéditions , cela faisait dix ans qu’on attendait. Dix ans, tu te rends compte ?

    Nous avons repris la mer avec douze navires et leurs équipages au complet, et le vent nous a poussés jusqu’au pays des Kikones. Puisqu’ils s’étaient alliés aux Troyens, on a aussi pillé leur ville. Ils ont lancé une contre-attaque ; nous avons perdu six hommes avant de fuir sur nos bateaux.

    Ensuite...la tempête. Des jours, des semaines de tempête, suivies de tout autant de mésaventures : le cap de Malée, les Lotophages…

     

    7 – Le cyclope

     

    ULYSSE – Et puis nous sommes arrivés sur l’île Petite, au pays des Yeux Ronds. Ce ne sont pas de grands marins, leur port était vide. En revanche, il y avait des chèvres. Des centaines de chèvres, des chèvres partout ! Délicieuses, d’ailleurs ! À bord d’un seul navire nous sommes partis explorer les environs et avons trouvé une caverne, avec une cour creusée devant des troupeaux entiers de brebis et de chèvres. J’ai débarqué avec mes hommes et emporté avec moi une outre de vin.

    La caverne était gigantesque, remplie d’agneaux, de fromages immenses, de lait, de terrines… Mes compagnons voulaient se servir et fuir, j’ai préféré attendre le retour du propriétaire des lieux.

    C’est le bruit de ses pas que nous avons entendu en premier. Nous l’avons même senti avant de l’entendre, le sol frémissait sous nos pieds. Et puis nous l’avons vu, des branches pour le feu sous les bras, ses troupeaux autour de lui. Et plus il avançait, plus il s’approchait, plus nous l’avons vu grandir, grandir, grandir… Les branches sous son bras étaient en fait des tronc d’arbres. Et lorsqu’il a été plus près… Il n’avait qu’un œil ! Un cyclope géant ! Il est entré avec les brebis pour les traire puis a fermé l’entrée de la caverne avec un immense rocher…

    Le cyclope ferme la porte et hurle en se frappant le torse. Son cri effrayant se transforme en papouilles aux brebis.

    POLYPHEME – Ah, fait du bien d’être rentrés à la maison, hein ? Ah, ça ‘tait bien la montagne, hein ? Na passé n’bonne journée, hein ? Na bien brouté ? Recommence demain ! Attention, hein ? Journée pas finie ! Il reste encore… La traite ! Oui, c’est bien… Allez, (il chante) «  A la traite, on y va, c’est la fête et pis voilà ! ».

    Il trait les brebis, avec un tout petit bruit mignon, leur donne des prénoms. L’une d’entre elle bêle.

    POLYPHEME – Chuuuuuut… L’est grognon hein. L’a pas fait la sieste…

    Il aperçoit Ulysse et ses compagnons, pointe un doigt menaçant.

    POLYPHEME – Vous c’est qui ? Pirates ?

    ULYSSE – Non, pas des pirates ! Des guerriers. Nous rentrons de la guerre et le vent nous a poussés jusqu’ici. Si tu étais assez bon pour nous offrir l’hospitalité…

    POLYPHEME – L’est où bateau ?

    Ulysse jette un œil en arrière à ses camarades.

    ULYSSE – Il est… Coulé. Nous avons fait naufrage sur le cap, nous sommes les seuls survivants.

    POLYPHEME – J’cra jvé mgé copin.

    ULYSSE – Quoi ?

    POLYPHEME – Je crois je vais manger tes copains.

    Le cyclope attrape un compagnon dans chaque main et les agites, ils hurlent.

    PREMIER COMPAGNON VICTIME – Aaah, au secours !

    Le cyclope écrase le premier compagnon.

    SECOND COMPAGNON VICTIME – Oh mon dieu, il lui a écrabouillé la…

    Bruit d’écrasement mou… Puis il en mange un en s’asseyant avant d’éplucher l’autre comme une banane, de le manger aussi et de commenter avec un grand sourire :

    POLYPHEME – L’est bon copain…

    Il se lèche les doigts, les essuie sur ses vêtements puis regarde dans la vague un moment, bienheureux. Le sommeil lui vient, il se couche doucement et essaie plusieurs positions avant d’être satisfait, puis ronfle vite.

    EURYLOQUE – Ulysse… Ulysse… Ulysseuh !

    ULYSSE – Chut, mais tais-toi donc, espèce d’imbécile ! Tu veux pas aller directement le réveiller pour lui demander s’il a pas envie d’un petit encas ?!

    EURYLOQUE – Ben oui d’accord mais on fait quoi ? Avec les gars on a discuté vite fait, tu vois, et on se disait que vu que c’est toi le chef et que t’es réputé pour être futé, tout ça, tu vois, ben tu pourrais peut-être aller lui mettre un coup de glaive dans le buffet ? Nous on veut bien s’en charger hein, mais bon on sait que t’aimes bien les défis…

    ULYSSE – Et on sort comment après, bande d’ahuris ? Y’a une caillasse de quatre mille mines devant la porte.

    EURYLOQUE – Ouais c’est ce que je leur ai dit mais ils ont répondu que t’aurais sûrement une idée.

    ULYSSE – Ouais Euryloque, ouais j’en ai une, d’idée. Je vais le laisser vous bouffer et je sortirai tout seul derrière quand il ira à la selle.

    Euryloque rit jaune, puis un temps, soupçonneux.

    EURYLOQUE – Ahahah. C’est pas vrai, hein ?

    ULYSSE – Mais non imbécile. On va attendre demain.

    EURYLOQUE – Ah bon ?

    ULYSSE – Ouais. Demain il va repartir. Quand il revient on se débrouille pour qu’il se couche tôt et si possible sans manger, si tu vois ce que je veux dire. Là on le saoule, et une fois qu’il est bien, bien dans le coma, on lui plante le poteau là-bas, bim dans l’œil ! Arrivé au matin, il faudra bien qu’il sorte et il ne pourra pas nous voir sortir derrière lui.

    EURYLOQUE – Ah ouais, ouais ! Pas bête ! C’est vraiment une super idée ! J’ai juste une toute petite question : pourquoi on fait pas ça dès ce soir, en fait ? C’est toi le chef, chef !

    Ulysse se relève.

    ULYSSE – Le lendemain matin le cyclope a encore bouffé deux de mes compagnons pour le petit déjeuner. Une fois la grande porte de pierre refermée, nous nous sommes préparés et avons taillé le poteau en pointe…

    ALKINOOS – Si je peux me permettre une toute petite remarque, tu ne parles pas du tout à tes hommes de la même manière qu’aux autres…

    ULYSSE – Oui, bon, alors c’est vrai, mais il faut reconnaître qu’ils sont gonflants aussi ! Eh, oh, arrivé là ça faisait déjà dix ans que je me les trimballais, moi !

    Le soir venu, le cyclope a encore attrapé deux de mes compagnons pour les dévorer. Dont un bien bête d’ailleurs ! Une fois qu’il a eu terminé, je me suis approché de lui avec l’outre de vin que j’avais apportée et lui en ai servi.

    Retour à la grotte…

    ULYSSE – Cyclope, voilà le vin que nous avions sur nos bateaux, c’est la seule outre que j’ai pu sauver. Si tu me renvoyais chez moi, je pourrais t’en ramener d’autres.

    Polyphème boit verre sur verre, Ulysse le sert régulièrement.

    POLYPHEME – L’est bon ton vin. Encore. Quoi c’est ton nom ? Moi va faire à toi cadeau surprise.

    ULYSSE – C’est très aimable à toi. Tu veux savoir mon nom, tu dis ? Bois encore et je te le dirai.

    Ulysse termine l’outre de vin dans un dernier verre et la jette.

    ULYSSE – Je m’appelle… Personne. Voilà, c’est mon nom. C’est le nom que mes parents m’ont donné et c’est ainsi que mes compagnons m’appellent.

    ELPENOR – Ben non, pas du tout, tu t’app…

    Ulysse lui met une beigne.

    ULYSSE – Si, c’est comme ça que je m’appelle ! Idiot !

    ELPENOR ( se massant la bouche) – Bah oui mais faut prévenir aussi…

    POLYPHEME – Alors voilà cadeau moi va faire à toi, Personne : moi vais manger toi dernier.

    Polyphème s’écroule et se met à ronfler.

    ULYSSE – Nous avons saisi le pieu d’olivier et l’avons plonger dans le feu. Avant qu’il ne s’enflamme, à cinq nous l’avons soulevé et enfoncé vivement dans l’œil du géant, qui s’est mis à grésiller sous la chaleur. Il s’est réveillé en hurlant, agitant les bras dans tous les sens, saccageant la caverne et piétinant ses bêtes. Les autres cyclopes voisins, alertés par les cris, accoururent et ouvrirent la grande porte de pierre.

    LES CYCLOPES – Polyphème ! Quoi sui va pas ?! Polyphème !

    POLYPHEME – Bwaaaaaah ! M’a crevé l’œil ! Vois plus ! Vois plus rien !

    LES CYCLOPES – Ooh, qui t’a fait ça ?

    POLYPHEME – C’est Personne ! C’est Personne m’a fait ça !

    Un temps, les cyclopes sont perplexes…

     

    LES CYCLOPES – Ah bah là si c’est personne…

    Ils s’en vont.

    LES CYCLOPES – L’est zozo lui. Va pas crier comme ça alors c’est personne...

    POLYPHEME – Mais non, pas personne, Personne ! Non pas sortir les moutons ! Rhoo ! Mes beaux moutons ! Faut pas les humains ils sortent. Vais mettre mes mains pour pas ils sortent.

    ULYSSE – Euryloque, va chercher l’osier dans son lit, on va attacher les béliers ensemble trois par trois et s’accrocher en dessous. Beh oui, comme ça il ne pourra pas nous sentir avec ses gros doigts ! Et bah s’il n’y en a pas assez pour tout le monde je prendrai le plus gros tout seul, ça ira très bien !

    Quoi, parce que ça vient à personne d’autre idée comme ça en fait, y’a que moi ? Je fournis, je fournis, jamais un merci… Bon, allez dégage, va faire tes trucs !

    Ulysse regarde à la ronde et va rejoindre le bélier avant de s’installer dessous.

    ULYSSE – Bon ça y est ils sont tous sortis, il ne reste plus que moi. Allez, avance, le bélier. Hop. Pschhh ! Dépêche-toi, le jour se lève ! Allez !

     

    LE BÉLIER – Non mais t’es pas bien toi, tu crois quand même pas que je vais te faire sortir comme ça ? Tu plantes un arbre dans l’œil de mon maître, et tu crois que je vais t’aider ?

    ULYSSE – Ah bah t’es gonflé quand même, il a bouffé la moitié d’entre nous !

    LE BÉLIER – Et alors ? Il est chez lui ! Il fait ce qu’il veut !

    ULYSSE – Ouais, donc toi aussi ? Il te bouffe s’il veut !

    LE BÉLIER – Ah bah non, pas moi ! Moi, il a besoin de moi. Je suis le plus gros et le plus fort, je fais des agneaux pour lui. Avec les brebis. Elles sont toutes à moi. Je suis leur roi, un peu. Et leur père, aussi. Et leur frère, aussi, pour certaines.

    ULYSSE – Ah ouais ? Et le jour où il y aura un bélier plus jeune, plus gros et plus fort, tu crois que ça sera qui leur père ?

    LE BÉLIER – Bêêêêêêêêên, euh… Déjà il faudrait que ça arrive… Et puis je suis sûr que…

    ULYSSE – Bon, allez museau, ça suffit, on est les derniers là ! Tu m’a saoulé ! Tiens t’a gagné, je te serre les testicules ! Et je te jure que si t’avances pas je te les arrache !

    Ulysse lui attrape les testicules. Le bélier glapit et avance difficilement.

    LE BÉLIER – Non mais t’es pas bien toi ! Ça fait hyper mal !

    Polyphème tâte toujours devant lui de ses mains pour filtrer la sortie.

    POLYPHEME – Oh c’est Kiki. Pourquoi sors dernier Kiki ? D’habitude sors premier.

    LE BÉLIER – Bah oui mais…

    ULYSSE – Tchhhht ! Qu’est-ce que je t’ai dit ? Allez avance, et pas un mot !

    Le bélier avance et sort de la caverne.

    ULYSSE – Ahah, Kiki, joli nom ça, Kiki. Très viril, très chef de gang. Très mâle alpha. Allez les gars, vite, tout le monde au bateau ! Et embarquez les brebis avec vous ! Oubliez pas Kiki ! Hé, Cyclope ! Cyclope ! Tu voulais savoir mon nom, et bien je vais te le dire. Si on te demande, tu pourras répondre que celui qui t’a crevé l’œil est Ulysse, fils de Laërte et roi d’Ithaque, et vainqueur de Troie !

     

    8 – Éole et les Lestrygons

     

    ULYSSE – Depuis ce jour son père Poséidon s’acharne contre moi et m’empêche de rentrer à Ithaque. Nous avons retrouvé nos compagnons restés auprès des autres bateaux et sommes partis en direction d’Éolie, l’île qui flotte, où le roi Éole nous accueillit à bras ouverts durant tout un mois. Nous lui avons raconté Troie, sa chute et nos malheurs. Ben, un peu comme à toi en fait.

    Éole est un être béni à qui Cronos, le fils du ciel et de la terre, a donné le pouvoir de contrôler les vents. Classe, hein ? Alors, lorsque le moment de partir fut venu, il sacrifia un taureau, fit un sac de sa peau et enferma tous les vents à l’intérieur, à l’exception du Zéphyr qui nous pousserait jusque chez nous… Au bout de neuf jours et neuf nuits, nous touchions au but : Ithaque était devant nous, enfin ! Heureux mais épuisé d’avoir tenu la barre depuis notre départ, je suis allé me reposer.

    Elpénor rassemble les compagnons autour de lui.

    ELPENOR – Les gars ! Hé, les gars, venez. Y’a quoi dans ce sac, hein ?

    EURYLOQUE – Comment ça y’a quoi dans le sac ? Y’a les vents dedans, t’a pas écouté quand on t’a expliqué ?

    ELPENOR – Ouais, non, d’accord Euryloque, mais y’a quoi en vrai ? Si ça se trouve il est plein d’or et de pierres précieuses et il ne veut pas partager. Déjà qu’il a récupéré plein de trucs après le sac de Troie, et que nous on n’a quasiment rien…

    EURYLOQUE – Ah bah oui, d’accord, sauf que je te rappelle que si toi t’as plus rien , c’est parce que t’as tout picolé dès que tu as pu !

    COMPAGNON 2 – Peut-être mais s’il a raison et que c’est un trésor j’en veux ma part aussi !

    EURYLOQUE – Non, alors attendez, qu’on se mette bien d’accord et ça faut pour tout le monde : y’a pas de trésor ! C’est les vents qui sont dedans ! Les vents !

    ELPENOR – Moi j’y crois pas. Un sac avec les vents dedans ? Je suis désolé mais c’est pas très crédible.

    EURYLOQUE – Ah ouais, parce que se coltiner un cyclope c’est crédible, pas de problème, mais un sac à vents d’un coup c’est pas possible ?!

    ELPENOR – Si ça se trouve tu dis ça parce qu’il t’a promis une part. Les gras, qui est pour ouvrir le sac ?

    LES COMPAGNONS – Ouais ! Ouais, moi ! Allez, on ouvre!

    EURYLOQUE – Non !

    Les compagnons ouvrent le sac, les vents se précipitent à l’extérieur, déclenchant une tempête. Tout le monde est balloté dans tous les sens. Euryloque parvient à s’agripper à un bordé du bateau.

    EURYLOQUE – Je vous l’avais bien dit qu’il ne fallait pas ouvrir ! On va tous mourir maintenant ! On va tous mourir et ça sera votre faute ! Vous êtes vraiment trop stupides ! Vous êtes incapables de tenir deux minutes sans faire une ânerie ! Comptez pas sur moi pour le dire à …

    Ulysse apparaît sur le pont agité.

    ULYSSE – Qu’est-ce qu’il se passe ici, par tous les dieux ?! Qu’est-ce que c’est que ce cirque ?!

    EURYLOQUE – Ils ont ouvert le sac ! Le sac d’Éole, avec les vents dedans !

    ULYSSE – Impossible ! Qui pourrait être assez idiot pour faire un truc pareil ?

    ELPENOR – Ben je sais pas, on s’est dit que si ça se trouve y’avait un trésor dedans.

    ULYSSE – Mais oui espèce d’abruti, y’avait un trésor ! On était enfin rentré chez nous ! C’était ça le trésor, bande d'imbéciles ! Je vous l’ai expliqué en détail !

    Les bruits de vents finissent de s’évanouir.

    ULYSSE – Les vents nous ont ramenés jusque chez Éole, qui nous refusa son aide.

    ÉOLE – Encore ?! Mais vous êtes maudits, ma parole ! Allez, barrez vous, quittez mon île !

    ULYSSE – Pas cool, mais je peux comprendre. Alors nous avons fait la seule chose que nous pouvions faire : nous sommes repartis.

    Le septième jour de mer, nous avons touché au pays Lestrygon et envoyé des émissaires. C’est une femme qu’ils ont rencontrés en premier, une femme immense, une géante !

    ALKINOOS – Une géante ? Ulysse… Loin de moi l’idée de vouloir mettre ta parole en doute, mais ça fait quand même beaucoup de géants dans cette histoire…

    ULYSSE – Oui, c’est vrai, mais celle-ci avait ses deux yeux, donc rien à voir… Elle était la fille du roi des Lestrygons, Antiphatès. Ensemble, ils ont piégé mes compagnons pour les dévorer. Deux d’entre eux réussirent à s’enfuir jusqu’au port, mais en un instant d’autres Lestrygons furent là, tous des géants eux aussi.

    ALKINOOS – Ben voyons…

    ULYSSE – Ils harponnaient mes compagnons, leur lançaient des pierres depuis les falaises. Nous n’avons eu que le temps de désamarrer notre bateau et de quitter le port, laissant derrière nous onze navires et leurs équipages au complet. Nous avons laissé tout le monde derrière nous, à se faire bouffer par des géants…

    ALKINOOS – Wow. Ulysse, tout ce que tu racontes là est vraiment… Difficile à croire, déjà. Et bouleversant, bien sûr. Et un peu lâche aussi…

    ULYSSE – Certains des hommes que j’ai abandonnés là-bas, je les aimais comme des frères… Nous sommes allés nous réfugier sur l’île d’Aiaié. Complètement abattus, nous n’avions plus la force, plus le courage de bouger.

    ULYSSE – Mes amis, il faut avancer. Si nous restons ici nous allons mourir de faim. Cette île est habitée, j’ai vu de la fumée depuis la vigie. Lançons une expédition et…

    COMPAGNON 1 – Ouais, et comme ça on pourra se faire bouffer par des géants !

    COMPAGNON 2 – Ah non, j’en peux plus des géants, Ulysse, j’en peux plus de manquer de me faire bouffer toutes les semaines !

    ALKINOOS – Oui, non, mais c’est vrai que jusque-là il y a des géants un peu partout quand même. Enfin je ne remets pas en cause, mais bon … Combien tu mesures, toi par exemple, par rapport à… Non rien, laisse, d’accord, j’insiste pas… C’est juste qu’on dirait que cette histoire est racontée par un gamin qui invente au fur et à mesure. Et qui fait une fixation sur les géants…

    ULYSSE – Je ne fais pas de fixation sur les géants ! Ce sont les géants qui font une fixation sur moi !

    De retour à ses camarades.

    Écoutez, je sais que tout n’a pas été facile ces… Douze dernières années, mais j’ai un plan inloupable, cette fois ! La moitié d’entre nous va partir en reconnaissance, et l’autre restera ici. J’ai mis les noms de tout le monde dans ce casque, et on va tirer au sort. Et on va tirer au sort ! Bon… Et mince… Euryloque.

    EURYLOQUE – Ooh, noon ! Non, sérieux, non ! Pourquoi moi ? J’étais dans la caverne du cyclope moi, déjà ! Je suis ton beau-frère, Ulysse ! Ton beau-frère ! Tu as vraiment envie d’aller annoncer à ta frangine que tu m’as envoyé me faire bouffer ?

    ULYSSE – Écoute, plus vite vous serez partis, plus vite vous serez revenus. Mais si, vous allez revenir ! On ne peut quand même pas exclure d’emblée la possibilité qu’il ait juste un petit vieux sur cette île, qu’il nous donne à manger et nous aide à repartir, mince ! Et puis tu ne seras pas seul. ( Il pioche de nouveau dans le casque.) Antiphos, Politès… Peut toujours servir… Dolios, Etéoneus, Elpénor…

    EURYLOQUE – Ah ouais super, ouais. Et bah allez les castors juniors, prenez vos guenilles et suivez-moi.

    Il sort. Noir.

     

    (ANNE-LISE)

    9-Circé

    Euryloque entre en courant, essoufflé, ébouriffé, halluciné.

    EURYLOQUE- Ulysse ! Ulysse ! Ah vous êtes encore là !

    Il faut qu' on se barre, vite ! Tout le monde aux bateaux, tout de suite !

    ULYSSE- Woh ,woh,woh, calme toi Euryloque.

    Qu'est-ce qu' il s'est passé ? Où sont tout les gars ?

    EURYLOQUE- Elle les a transformés en cochons ! Tous !

    En cochons, bons dieux ! Ils sont tous en train de de se

     rouler dans la boue en attendant qu' elle les change en

    rillettes ! Je t' avais dit qu' on allait encore se faire bouffer par quelqu' un !

    ULYSSE- Quoi ? Mais qui ça <<Elle>> ?De qui tu parles !?

    ALKINOOS- Une géante ! Cent drachmes sur une géante !

    EURYLOQUE- La sorcière ! La saleté de sorcière qui vit dans la forêt !

    Quand on est arrivés elle chantait, détente, et Politès a sonné.

    Elle a ouvert, normal, et ils sont tous entrés, tu me diras normal aussi, mais moi je trouvais  que ça sentait un peu le faisan, cette histoire, alors je suis resté dehors. Je suis monté dans un arbre pour voir chez elle,  et alors là j'ai vu !Elle leur a donné à boire, à manger, tranquille, et d' un coup PAF! Elle leur a mis un coup de

    baguette magique, et ils se sont tous transformés en cochons! Il faut qu' on se barre!

    ULYSSE- Attends , attends , mais s' ils sont toujours vivants on ne va quand même pas les laisser comme ça!

    EURYLOQUE- Mais carrément que si on va les laisser comme ça!J' y retourne pas moi ! Déjà les géants partout c' était chaud mais si même les nanas qui chantent à moitié nu dans la forêt s' y mettent , je veux plus voir personne moi !

    ULYSSE- Bon, calme toi, on va aller les chercher. Les gars, donnez -lui  un coup  de gnôle, je vais voir ce qu' il en est.

    (ELISA)

    Ulysse accompagne Euryloque hors scène puis revient.

    ULYSSE- Il va pas bien lui, s'il continue c'est le burnout assuré... Qu'est-ce qui pue la sueur comme ça ?

    HERMES- Pardon, c'est moi.

    ULYSSE- Aah, la vache mais vous êtes qui vous ?

    HERMES- Ben, les chaussures ailées…? Le bâton avec les serpents ?Hermès ?Messager de dieux ?

    ULYSSE -Ah ouais ?Messager de dieux ?Et bien tu tombes bien mon gars, j'ai deux ou trois messages à leur faire passer ! Ils sont au courant que tout le monde essaie de nous bouffer ? C'est normal ça ?Est-ce qu'ils trouvent ça normal ?

    ALKINOOS -Et dites-leur pour les géants tout le temps aussi...

    HERMES- Tu sais, moi je ne maîtrise pas toute la chaîne de l'information, je me contente de délivrer les messages, c'est tout...

    ULYSSE-Ouais, donc personne n'est jamais responsable, c'est ça?

    HERMES- Hé, ho, hé, dis donc , moi à l'origine je suis venu pour t'aider, mais je peux aussi repartir prendre une douche!

    ULYSSE-Non, pardon, vas-y parle.

    Hermès fouille dans ses poches et tend un petit paquet à Ulysse.

    HERMES- Tiens, prends ça. C'est de l'herbe. Tu la manges, et Circé ne pourra pas te changer en cochon.

    Alors hop, tu sors ton couteau et tu la maîtrises. Là elle va te séduire.Oui elle est comme ça, c'est son truc...Surtout tu dis oui! C'est une déesse, on ne refuse pas les avances d'une déesse. Mais avant, elle doit te  faire la promesse qu'elle ne tentera rien contre toi.

    Ulysse est de retour chez Alkinoos.

    ULYSSE-Et tout s'est passé exactement comme il m'avait dit.Une fois que nous avons eu honoré les dieux ensemble, Circé accepta de libérer mes compagnons de leur sort. Nous sommes restés chez elle durant un an, elle nous a nourris et divertis, et m'a aussi accueilli dans son lit. Et puis un jour...

    (MEWEN)

    Circé titre sur sa cigarette,souffle la fumée et regarde Ulysse.

    CIRCE- Ça va Ulysse ? T'a pas l'air dans ton écuelle.C'était pas  bien? 

    ULYSSE-Si si,c'est pas toi...

    CIRCE- Tu penses - Tu penses encore à ta femme, c'est ça  ? Tu y penses tout le temps à ta femme! Pénélope par - ci, Pénélope par là... ça fait bientôt douze ans que tu l'as laissée, tu crois quand même pas qu'elle t'attend gentiment? 

    ULYSSE- Qu'est ce que tu veux dire ?

    CIRCE- Je ne vais quand même pas te faire un dessin...

    ULYSSE- Bon, écoute, je vais y aller moi...

    CIRCE- d'accord. A tout a l'heure. Ramène des olives si tu y pense.

    ULYSSE- Non, Circé. Je vais y aller vraiment. Tu m'avais promis que tu me laisserais partir le jour ou j'en aurais envie, et c'est maintenant. Et puis mes hommes s'ennuient, ils réclament à rentrer chez eux. Je vais leur dire de se préparer au départ.

    Silence. Circé regarde droit devant elle et fume.

    CIRCE- Bon...d'accord.

    ULYSSE- Voilà. Désolé.

    CIRCE- Non, non, il ne faut pas. Je veux dire, si tu ne veux pas rester, je ne vais pas te retenir de force. En revanche, il y a deux trois choses que je ne t'ai pas dites. Il va falloir que tu ailles voir Tirésias. C'est pas ma décision, tu comprends ? Ça vient d'en haut. Apparemment c'est le seul à savoir comment faire pour rentrer chez toi. 

      (NOA)

    ULYSSE- Tirésias? Tirésias le devin? Mais il est mort Tirésias ,non? Il s'est chopé une colique en buvant de l'eau trop froide quand il quittait Thèbes.

    CIRCE- Oui, c'est ça le truc mon loulou. Si tu veux rentrer chez toi, il va falloir que tu ailles le voir là où il est maintenant: chez Hadès.

    ULYSSE- Aux enfers?!

    CIRCE - Aux  enfers.

    ULYSSE -Ah merci ça  donne très envie de rentrer chez soi!

    Circé se lève.

    CIRCE- Non, écoute-moi mon loulou,c'est pas compliqué, il suffit de suivre les indications. Tu prends ton bateau et tu pars plein sud en suivant le Borée, il va te souffler dans le dos pendant un moment. Ensuite il y a une aire de repos, le Bois de Perséphone. Tu te gares là et tu continues à pied à travers les marais.Au bout d'un moment, tu vas arriver  à un immense carrefour où tous les fleuves  des enfers se  rejoignent: Le Styx, l'Achéron, le Pyriphlégéton, le Cocyte, tu peux pas te tromper, c'est un vrai cirque! Là, il y a un immense rocher, tu te mets dessous et tu creuses une tranchée. Dedans, tu vas sacrifier toutes les bêtes que tu as à disposition, toutes. Les morts vont se pointer pour boire le sang, tu ne les laisses pas faire tant que Tirésias n'est pas arrivé, d'accord?

    --------------------------------------------------------------------------------

    (MAEL)

    10-Dialogue avec les morts

    Ulysse fait les cent pas aux enfers.

    ULYSSE-Mais qu'est-ce qu'il fiche ? Qu'est-ce qu'il fabrique

    bon sang, c'est pas possible ! On va quand même pas

     l'attendre des plombes,on est aux enfers, pas en pique-

    nique ! Et retenez-les, les gars, ils n'ont pas le droit de

    boire !

    Les compagnons repoussent les morts qui tentent de boire

    le sang.

    LES MORTS -Aaaargh, s'il vous plait, on a soif. Le sang...

    LES COMPAGNONS - Non, tiens, allez prends ça,

    charogne !

    LES MORTS - Baaaaah ! Pas sur la tête! On a soiiiiif, allez

    quoi!

    LES COMPAGNONS- Non, filez, ouste, les morts!

    EURYLOQUE- Hé Ulysse, c'est pas Tirésias là-bas ?

    LES COMPAGNONS - Ah oui, oui, il a raison, c'est Tirésias !

    LES MORTS - Ouais ouais ,c'est Tirésias...

    LES COMPAGNONS- Tirésias, Tirésias, Tirésias !

    Tirésias entre, titubant, aveugle.

    TIRESIAS- Aaaaaaaahraaaaaaargh... Qu'est-ce que c'est

    que ce cirque, on ne s'entend plus ici! Qu'est-ce qu'ils

    fichent là tous ceux-là? C'est pas possible il y a toujours

    un mode fou ici, on se croirait sur l'Acropole. Ils ne

    peuvent pas nous tranquilles tous ces vivants ?

    Faut toujours qu'il y en ait un pour venir nous embêter.

    Rentrez chez vous, les vivants!

    ULYSSE- Tirésias, je t'en supplie, dis-moi comment 

    faire pour rentrer chez moi ! Ça fait 12 ans que je galère !

    TIRESIAS- Aaaaarrh...Mollo bambino, mollo.Qu'est-ce 

    que tu m'as apporté déjà ? Je parle pas sans boire moi !

    (CHLOE)

    ULYSSE-Tiens,bois le sang ! J'ai sacrifié toutes ces bêtes  pour toi , en ton nom !



    TIRESIAS- Du sang ? Encore du sang ? Toujours du sang... C'est pas possible, ils viennent tous avec du sang, ils pourraient pas venir avec une bonne bouteille de vin de temps en temps? Ou de l'ouzo, je sais pas moi,je suis pas difficile...Bon,il est où ton sang là ? Aaaaarh... pas mauvais. T'as mis du bœuf ? On sent bien le bœuf...Bon,qu'est-ce que tu voulais déjà?

    Ulysse attrape Tirésias par le col.

    ULYSSE- Dis-moi comment faire pour rentrer chez moi!

    TIRESIAS- Lâche moi ! Il est fou celui-là, il s'attaque à un vieillard ! Je suis infirme, moi Monsieur.Et aveugle même ,alors doublement infirme.

    Bon , qu'est-ce que je disais moi déjà ? Ah ouais rentrer chez toi. Rentrer chez toi... Et ben ? Je vais pas te cacher que jusque-là c'est quand même pas hyper bien emmanché cette histoire. Ah , bas c'est Poséidon , il t 'aime pas . Ah mais alors il te déteste , hein ! En même temps tu lui as crevé l’œil de son fils... Et puis c'était un cyclope, alors il n'en avait qu'un ! Ahah!

    Bon , bref ,si tu te tiens à carreau ça devrait pas trop mal se passer . Quand tu vas rentrer chez toi, tu vas passer devant l’île du Trident , la Sicile. Bon , tu vas accoster, et puis... Ah sisi, mon gars , tu vas accoster , j' te le dis, t'auras pas le choix. Bon , écoute, t'es venu chercher des infos ou pas ? Alors tu notes : « Je vais accoster ».

    Bon. Ben y' aura des vaches , là , plein, et puis des brebis aussi, des tas. Au dieu Soleil, qu'elles sont les vaches et les brebis, des belles bêtes. Bon, ben vous les touchez pas ! Et puis de toute façon le dieu Soleil il voit tout hein, alors vous touchez à rien et puis vous vous barrez. Sinon tous tes copains vont mourir et toi , tu ne rentreras jamais chez toi. T'as compris ?

    (MORGAN)

    ULYSSE - Oui. Merci. Et désolé pour tout à l'heure. C'est juste que ça commence à faire long quoi.

    TIRESIAS - Oui, non, ben pas de quoi. Enfin la prochaine fois vient plutôt avec une bouteille de jaja ou un truc comme ça, parce que moi le sang là...Bon allez je filoche moi.

    ULYSSE- Attends ! Regarde tous ces morts. Je les reconnais ! Agamemnon , Achille ! Patrocle !

    TIRESIAS - Ah ouais, ben tu sais c'est le royaume des Morts ici. Du coup ben... Y'a des morts quoi. Ceux que tu as laisseras boire le sang te diront la vérité. Les autres s'en iront.

    Il sort. Ulysse  se retourne vers ses compagnons.

    ULYSSE- Laissez-les boire, les gars ! Laissez-les boire ! Agamemnon, mon ami tu es mort ! Et moi qui te croyais rentré chez toi ! Qu'est ce qu'il t'est arrivé ?

    Agamemnon se relève et s'essuie la bouche du dos de la main.

    AGAMEMNON- Salut Ulysse. Ça me fait plaisir de te voir. Quoique j'aurais préféré ne pas être mort pour en profiter mieux.

    Enfin bref...Comment va Pénélope ? Et le petiot ? Comment il s'appelle déjà ?

    ULYSSE- Télémaque.

    AGAMEMNON- Télémaque, c'est ça oui. Il va bien ?

    ULYSSE- Je ne sais pas. Je ne suis toujours pas rentré chez moi...

    AGAMEMNON- Bon , allez Ulysse, on y va nous. A je ne sais pas trop quand...

    ULYSSE - Non allons restez ! On vient juste de se retrouver...

    Ulysse se retourne et se fige en reconnaissant sa mère devant lui.

    (INAYA)

    ANTICLEE- Bonjour Ulysse.

    ULYSSE- Maman ? Qu'est-ce que tu fais...

    ANTICLEE- Ici ? D'après toi mon chaton ? J'étais déjà vieille quand tu es parti...

    ULYSSE-Je suis désolé.

    ANTICLEE- Non. Il ne faut pas. C'est ainsi que le monde est fait, Ulysse. Et toi , tu rentreras chez toi , tu retrouveras Pénélope et ton fils Télémaque.Tu n'as plus besoin de moi depuis longtemps , Ulysse. C'est un homme que je vois en toi, Ulysse, un grand homme puissant et fier , que sa femme et son fils attendent.

    ULYSSE- Comment vont-ils ?

    ANTICLEE- Télémaque est un beau garçon , courageux, il tient de toi. Il règne sur Ithaque en attendant ton retour. Tout le monde l'aime.

    ULYSSE-Et...Pénélope ?

    ANTICLEE- Cette femme t'aime. Autant qu'une femme peut aimer un homme, elle t'aime. Tu es parti depuis si longtemps...Pourtant , elle continue de croire à ton retour...

    ULYSSE-Alors , elle m'attend...

    ANTICLEE- Évidemment qu'elle t'attend, gros bêta. Il faut que je te quitte maintenant, Ulysse.

    ULYSSE- Oui. Merci , Maman. Merci pour tout, toujours.

    ANTICLEE- Adieu mon chaton.

    ULYSSE-Adieu.

    Noir.

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    (ELIAS)

    11-Les sirènes, Charybde et Scylla

    Euriloque tourne autour d'Ulysse, cordage à la main, pour l'attacher au mât du bateau.Plusieurs tours ont déjà été faits.

    EURYLOQUE- Donc, qu'on récapitule tout ce que Circé t'a dit, hein.On va passer par un coin où des nanas à moitié nues et des ailes, qui vivent sur une île remplie d'ossements, vont chanter pour essayer de nous bouffer, et ensuite on devra choisir entre une créature qui va tous nous bouffer d'un coup en avalant la mer tout entière et une autre avec six têtes et des moignons à la place des

    jambes...Normal...Qui, elle, va nous bouffer chacun notre tour, c'est bien ça?

    ULYSSE-Pour la quatrième fois: ouais.Bon, tu finis de m'attacher à ce mât oui ou mince ?

    EURYLOQUE- Et j'imagine qu'il y en a une des deux qui est géante, hein? C'est laquelle la géante ?

    ULYSSE-Les deux...

    ALKINOOS- Rhoooooooo, mais enfin non... Ulysse, c'est pas possible, tu es complètement  monomaniaque !Enfin bon, continue ton histoire, mais franchement là plus personne ne te croit...

    EURYLOQUE- Mais pourquoi on fait ça, en fait ?Je veux dire, on pourrait très bien rester ici et se bouffer entre nous, au fond ça ne changerait pas grand-chose et ça resterait dans la famille...

    ULYSSE- Pour rentrer chez nous ! Tu n'as pas envie de revoir Ithaque ? Tes enfants ? Ta femme ?

    EURYLOQUE- Ben tu sais, moi, ma femme...

    ULYSSE-Hé, ho, mollo, c'est de ma mère dont tu parles !

    ELPENOR- Moi ce que je ne comprends pas , c'est pourquoi toi tu veux écouter les sirènes alors que nous, on doit se boucher les oreilles ?

    (ALEX)

    ULYSSE- Parce que c'est moi le chef ! Ça te va comme explication ? Non mais c'est vrai, quoi, j'ai le droit d'écouter les sirènes? C'est qui le roi ici ? On ne va quand même pas tout discuter tout le temps, quoi ! Allez, finissez de vous remplir les esgourdes de cire, on ne va pas tarder à arriver chez elles.

    ALKINOOS- Et alors, à quoi ressemblait leurs voix ?

    ULYSSE- C'était le chant le plus mélodieux que j'aie jamais entendu ! J'aurais voulu pouvoir me jeter a l'eau et les rejoindre à la nage pour les écouter encore et encore... Aujourd'hui avec le recul, ça ressemblait plutôt  à un banc de femmes assises sur leur rocher qui criaient...

    LES SIRENES- Salut mon gros loulou ! Viens nous voir, beau mataf, on est nombreuses et pleins de talents ! Y'a la grosse Rita qui sait frétiller des écailles sans bouger sa caudale...>>

    ALKINOOS- Oui, je vois, nous avons une Rita aussi à Phéacie, qui sait faire plein de...(Il marque un temps, sous le feu du regard de sa femme) Euh, enfin je ne la connais pas personnellement, hein...j'ai juste entendu dire... Ahem, bon, et donc euh... Ensuite, tu es allé aux deux écueils ?

    ULYSSE- Oui. Nous sommes arrivés du côté de Scylla, et nous avons continué sur ce bord. De l'autre côté on voyait Charybde vomir la mer entière. On était comme hypnotisés.

    C'est alors que six de mes compagnons ont disparu autour de moi .Le temps que j'entende leurs cris, ils étaient déjà haut sur le rocher, dans les gueules de Scylla.Ils hurlaient, appelaient mon nom jusqu'à ce que la bête les déchiquette et les fasse taire... De tous les souvenirs qui m'empêchent de trouver le sommeil la nuit, c'est probablement celui-ci qui revient le plus souvent... Une  fois l'écueil passé , la mer est redevenue  outrageusement calme. Avec un équipage dévasté, nous étions en direction de l'île du Trident.

    De retour sur le bateau.

    ULYSSE- Bon allez les gars, allez, rassemblez-vous. Ça va ? Écoutez, je vous propose qu'on laisse passer l'île et qu'on se dirige directement sur Ithaque.

    (GARANCE)

    EURYLOQUE- Pardon ? Attends, t'es sérieux ? On est tous complètement épuisés, on réchappe depuis des mois à des monstres qui veulent tous nous bouffer, d’ailleurs pour information on vient encore de perdre six copains, je ne sais pas si tu es au courant, c'était il y a cinq minutes ! Et puis je suis désolé d'insister mais j'ai toujours pas eu de réponse valable : apparemment tout le monde veut nous bouffer !! Et là on a une île bien calme devant nous, on peut quand même prendre une nuit de repos sur le sable !

    LES COMPAGNONS- Ouais, il a raison ! On a la dalle et on est crevés ! Et demain on repart ! 

    EURYLOQUE- Regarde le ciel, Ulysse, regarde moi ce ciel ! Les dieux nous sont enfin cléments ! Et puis qu'est-ce ça va changer, juste une nuit ici ? On va pouvoir faire du feu, manger un truc chaud, ça va faire du bien à tout le monde !  

    LES COMPAGNONS- Ouais, du bien à tout le monde !

    EURYLOQUE- Et demain à la première heure, hop on repart.

    LES COMPAGNONS-  Ouais, hop !

    ULYSSE- D'accord, d'accord ! De tout façon le vieux schnock m'avait prévenu qu'on accosterait quoiqu'il arrive... Mais je vous préviens les gars, personne ne touche au bétail, sous aucun prétexte ! Pas un poil, même pas s'ils ont l'air appétissants ! Je suis sérieux, c'est une question de vie de mort !

    EURYLOQUE- Oui, enfin calme toi, c'est juste du bétail, faut pas exagérer...

    LES COMPAGNONS- Ouais, faut pas exagérer !

    EURYLOQUE- Eh ho, ça va pas non ? Vous n'allez pas vous mettre à répéter tout ce que je dis non plus ?!

    ULYSSE- Je suis très sérieux ! Tirésias m'a prévenu que si on touchait au bétail sur cette île on ne rentrerait jamais chez nous ! ?

    EURYLOQUE- D'accord ! Ok, on ne touche pas au bétail ! Il commence à avoir bon dos ce Tirésias, dès qu'on n'est pas d'accord avec lui , il nous sort la carte du vieil alcoolique infirme ! Et aveugle...et mort...Bon allez les gars, direction la plage !

    De retour chez Alkinoos.

    ULYSSE- Évidemment, la tempête a vite repris. Au bout d'un mois sans répit , il a fallu se résoudre à chercher des vivres. J'ai rappelé à mes imbéciles de compagnons l'importance de ne pas toucher au bétail, et de ne chasser que de petits oiseaux et des poissons.

    Un matin, je fus réveillé par l'odeur la plus appétissante que j'avais jamais sentie. Ils avaient abattu et cuit les plus belles bêtes, et se les partageaient pour le petit-déjeuner. J'étais comme fou !

    Le lendemain matin le ciel s'est lavé, le vent est tombé; nous sommes repartis. Niveau ambiance c'était pas les férias de Delphes... De toute façon on est pas allés très loin. En quelques minutes, la tempête s'est levée de nouveau, a fracassé notre navire et jeté tous les hommes à l'eau.(Il boit à l'évocation de se souvenir.) La foudre a frappé le mât qui est tombé et a broyé le crâne d'Euryloque sous mes yeux. J'ai réussi à m'agripper au bois rugueux pendant que les flots m'emportaient...Et puis Calypso m'a recueilli. La suite, vous la connaissez.

    ALKINOOS- Merci pour ton récit, merci d'avoir partagé tes peines. C'était vraiment... Géant. Tes malheurs sont terminés, héros, et ce fut un immense honneur que de t'avoir à nos côtés. Allez va, mon ami, va. Et bonne route !

    Noir.

    (ROJDA)

    12- Retour à Ithaque

    La lumière monte lentement sur Ulysse endormi. Il se réveille et découvre son nouvel environnement.

    ULYSSE-Je suis où, là ? Qu'est ce que c'est que cette

    brouillasse ? C'est pas Ithaque ça... Oh non, mais quelle

    bande de débiles ces Phéaciens, où est-ce qu'ils m'ont

     largué...

    ATHENA- Coucou !

    ULYSSE- Ah! Athéna ! Je n'arrive pas à savoir si c'est une bonne nouvelle de te voir là...

    ATHENA- Mais siiii, je suis toute excitée, ça va être super !

    ULYSSE-Mais quoi, qu'est-ce qui va être super ?

    ATHENA- Et bien regarde autour de toi !

    ULYSSE - Mais on voit rien ! On est dans la purée !

    ATHENA- Ouiiiii ! C'est pas moi qui ai mis le brouillard ! Je me suis dit que ça serait rigolo de te faire la surprise au réveil ! Regarde ! Clic clac, hop !

    Le brouillard se dissipe.

    ULYSSE- C'est... C'est la rade de Phorkys ! L'olivier ! Ithaque ! Je suis chez moi ! Je suis chez moi... Je suis...

    Il court tout autour du décor familier, tout à sa joie.

    ULYSSE- Mais c'est pas rigolo du tout ! J'ai cru que j'étais encore paumé à l'autre bout du monde... Ça te fait marrer de me trimballer comme ça ? T'es une gamine ou quoi ?Pénélope !  Il faut que j'aille voir Pénélope !

    ATHENA- Minute, papillon !

    ULYSSE-  Minute ? Mais enfin ça fait vingt ans que je l'ai pas vue !

    (LEON)

    ATHENA- D'accord, mais il faut que tu te prépares ! Bon alors ce que tu sais déjà c'est que Pénélope t'attend mais que les prétendants lui mette la pression pour qu'elle en épouse un. Jusque-là elle s'en est sortie avec son histoire de linceul, mais elle s'est faite balancer par une servante… Depuis, ils sont sur les dents . Ils ont prévu de tuer Télémaque quand il rentrera .

    ULYSSE- De quoi ? Mais il est où Télémaque ?

    ATHENA- Ben parti à ta recherche, patate?

    ULYSSE- Enfin, tu aurais quand même pu lui dire que j'étais vivant et que j'arrivais ! C'est complètement irresponsable !

    ATHENA- Alors déjà d'une,tu ne me parles sur un autre ton .Je suis une déesse moi, je te rappelle, immortelle et tout . Mon papa c'est Zeus, OK? De deux c'est un grand garçon, ça fait vingt ans que tu es parti, il est capable de se débrouiller seul . De trois, les autres débiles veulent le tuer avant d'épouser sa mère , je ne sais pas pourquoi ça m'a paru une bonne idée de le mettre à l'écart pendant quelque temps. Et puis de quatre … Pffouuuu ! T'es pas un peu tendu en ce moment, non.

    ULYSSE- Ah bon tu crois ?!

    ATHENA-T 'en fais pas , on va s'occuper des gros beaufs qui squattent ton palais ,d'accord ? Mais si tu débarques en disant « Salut tout le monde c'est moi Ulysse » , ça va pas le faire ! Alors on va te déguiser.

     (KELYA)

    ULYSSE- Je ne sais pas pourquoi, j'ai l'impression que ça ne sera pas en beau prince étranger...

    ATHENA- J'avais plutôt imaginé un vieux clodo bien crasseux ! Je vais te vieillir temporairement. (Elle chaque des doigts). Voilà. Allez, enfile ces guenilles, ébouriffe tes cheveux, ta barbe, et met-toi un peu de boue par-ci par-là. Voiiiiiilà, c'est parfait ! T'as vraiment l'air d'un vieux crado !

    ULYSSE- Attends, attends ! Quelqu'un vient...

    ATHENA- Pile à l'heure ! Coucou, Télémaque !

    ULYSSE- Télémaque ? Mais tu m'avais pas dit que...

    ATHENA- Chut ! Alors comment ça va, tu as fait bon voyage ?

    TELEMAQUE- Bonjour Athéna. Oui, merci beaucoup ! (à Ulysse) Bonjour Monsieur. On ne s'est pas déjà vus quelque part ?

    (RUBEN)

    ATHENA- Hihihi, " on ne s'est pas déjà vu quelque part "... Bon, je vous laisse faire connaissance hein, je vais cueillir des... cailloux... pour le potage...

    Elle sort.

    TELEMAQUE- Alors comme ça vous découvrez la région ?

    ULYSSE- Non, pas vraiment, non.

    TELEMAQUE- Ah bon ? Vous êtes d'où, alors ?

    ULYSSE- D'ici. Je suis d'Ithaque, en fait...

    TELEMAQUE-  Oh. Mais je ne vous ai jamais vu, si ?

    ULYSSE- Non. Enfin si, mais il y a vraiment très longtemps. Tu étais tout petit, tu ne t'en souviens probablement pas. Tu as beaucoup grandi. Tu es devenu... Très beau...

    TELEMAQUE- Merci, c'est gentil.

    ATHENA- Bon alors j'interviens avant que ça devienne vraiment chelou entre vous deux ! Tu permets que je t'arrange un peu ? Elle claque des doigts vers Ulysse ) Le monsieur s'appelle Ulysse.

    ULYSSE- Salut fiston.

    Télémaque regarde son père, interdit, puis sourit.

    Noir.

    (CLEMENT)

    13-Auprès des prétendants

    Une musique anime le banquet . Télémaque préside  la tablée.

    TELEMAQUE - Messieurs, puisque vous honorez cette maison de votre présence, une nouvelle fois, je vous souhaite un excellent appétit . Et n'oubliez pas de faire vos offrandes aux dieux. Ah, étranger, approche, viens partager notre repas . Fais le tour des convives pour réclamer ta part. 

    ULYSSE- Merci, jeune prince. Et merci à vous aussi, messieurs ...

    ANTINOOS- Alors, qu'est -ce que les vents nous ont apporté ? D'où vient ce pouilleux qui espère manger à l’œil ?

    TELEMAQUE- Antinoos, je te remercie de te soucier de mes vivres. Toutefois je constate que cela te dérange moins de les manger que de les offrir.

    ANTINOOS- Très bien. Puisqu'il en est ainsi, messieurs, que chacun donne à ce gueux autant que moi, et il pourra nous laisser tranquilles pour au moins trois mois !

    ULYSSE- Merci l'ami. Moi aussi, tu sais, j'ai eu une maison, des hommes, de quoi me nourrir, et aussi de quoi nourrir les autres. Et puis les dieux m'ont tout enlevé, et ...

    ANTINOOS- Mais tais- toi ! On se fiche complètement de qui tu est et d'où tu viens ! Ne touche pas à mon plat ou je te tabasse ! Allez, casse- toi avant que je t'écorche !

    LES PRETENDANTS- Calme- toi ! Calmez- vous ! Arrête, enfin, c'est juste un vagabond !

    (KAYNA)

    Chez Pénélope

    EURYCLEE- Oui, Madame Pénélope, ils battent l'étranger. Surtout Antinoos, Madame, il est hargneux comme jamais depuis qu'ils veulent vous obliger à... A choisir un époux...

    PENELOPE- Merci Euryclée. Fais-le venir, veux-tu ?

    Peut-être a-t-il des nouvelles d'Ulysse ?

    EURYCLEE- C'est ce qu'il dit, Madame. C'est ce qu'ils disent tous, et qu'à la fin y'en a jamais un qui dit la vraie vérité... Et vous, vous espérez jusqu'à plus de larmes ...

    Dans la grande salle du palais.

    ANTINOOS- Messieurs, puisqu'un deuxième cloporte nous est arrivé en plus du premier, que direz-vous d'organiser un grand combat de clodos ?!Une semaine de repas chauds pour le vainqueur, le perdant est banni du palais !

    LES PRETENDANTS- Haha, ouais, ouais ! Battez-vous les clodos, battez-vous les clodos !

    Chez Pénélope.

    PENELOPE- Je veux le voir, Euryclée. Jamais je ne baisserai les bras. Même si je prenais demain un nouvel époux, même si je faisais ce choix impossible, je crois que je continuerais d'espérer, tu comprends ? Allez, va le chercher, veux-tu ?

    (TIAGO)

    Dans la grande salle du palais.

    EURYMAQUE- Hé, le pouilleux, puisque tu es plus fort qu'on aurait cru, est-ce que tu ne voudrais pas devenir mon grouillot ? Je te ferais bosser aux champs, tu serais nourri, logé, blanchi. Qu'est-ce que tu en dis ? Non hein, trop feignant pour accepter de bosser ?

    ULYSSE- Tu te crois sans rival parce que tu es le plus grand et le plus fort de toute cette bande de débiles. Mais si le maître de maison revenait tu fileras ventre-à-terre te réfugier à l'autre bout de l'île.

    EURYMAQUE- Répète-moi ça, sale chien ! Je vais te tuer, je vais t'écrabouiller ! Lâchez-moi ! Je vais te réduire en charpie !Lâchez-moi je vous ai dit ! Tu viens dans la maison d'un autre insulter les invités, je vais te...

    TELEMAQUE- Ça suffit ! Taisez-vous, tous !

    La musique s'arrête brusquement.

    Jusqu'à nouvel ordre, cette maison est la mienne, et cet homme y a été invité, lui ! Il ne s'est pas imposé à ma table pendant des années, dilapidant mon héritage en espérant en plus épouser ma mère ! Sortez, allez-vous en, tous ! Je ne peux pas vous chasser définitivement, mais je peux au moins rétablir le calme jusqu'à demain. 

    Ils sortent. Télémaque se retourne vers Ulysse, ils sont seuls.

    TELEMAQUE- Je suis désolé, j'espère que tu ne m'en veux pas. Je ne supportais plus qu'ils te malmènent ainsi.

    ULYSSE- Pas du tout Télémaque, c'était très courageux de ta part ! Mais tu devrais être plus prudent, je te rappelle que ces hommes veulent te tuer.

    Euryclée est entrée.

    EURYCLEE- M'sieur Télémaque, y'a Madame Pénélope qui veut voir monsieur, à propos de Monsieur Ulysse.

    ULYSSE- Je te suis.

    Il sort à la suite d'Euryclée. Noir.

    (Hugo)

    14-Le bain

    Pénélope entre en s'adressant à une suivante.

    PENELOPE- Et apporte- nous quelques petites choses à grignoter quand tu auras une minute, tu veux bien?(à ULYSSE qui vient d'entrer) Ah bonsoir étranger.Je tiens à vous présenter mes excuses pour la manière dont vous avez traité aujourd'hui...Et bien ne restez pas planté là entrez ! Vous n'avez donc jamais vu de femme ?

    ULYSSE- Une comme vous Madame pas depuis très longtemps.

    PENELOPE- Vous êtes gentil. Allez, venez  plutôt vous installer et racontez-moi qui vous êtes.

    ULYSSE- Oh,madame, je crains de ne pas avoir grand chose de gai à raconter.

    PENELOPE- Je comprends, nous avons tous notre lot de tristesse moi-même, vous le savez sans doute, j'attends le retour de mon époux depuis maintenant vingt ans.

    ULYSSE-J'en ai entendu parler,oui.Je suis désolé.

    PENELOPE- Vous n'y êtes pour rien, mon ami ! On me pousse depuis à prendre un nouvel époux je m'en suis sorti avec une histoire de broderie ... jusqu'à ce qu'une de mes servantes me dénonce aux prétendants. Par jalousie je crois bien la pauvrette était amoureuse de l'un d'entre eux. Depuis, j'ai dû terminer le linceul, et maintenant...Et maintenant...

    Je veux que vous vous sentiez bien ici. Voulez-vous que je demande à une de mes servantes de vous baigner les pieds ? Vous avez dû tant marcher... Euryclée ?

    Accepterais-tu de baigner les pieds, de Monsieur ?

    EURYCLEE- Bien sûr, Madame. Avec plaisir, monsieur.

    Venez auprès du feu.

    (ELYES)

    PENELOPE - Euryclée est dans notre famille depuis même avant moi. Elle a eu le bonheur d'être la nourrice de mon époux. Tout ce que vous voudrez me dire sur Ulysse,elle peut l'entendre, je n'ai pas de secret pour elle.

    ULYSSE- Merci, Madame. ( A Euryclée ) Et merci à vous aussi. Et bien voilà, j'ai eu de la chance de rencontrer Ulysse lors de mon voyage... Lors de son voyage vers Troie. Je l'ai accueilli... Ouh, c'est chaud ! Je l'ai accueilli une douzaine de jours, et il est parti pour la guerre...

    PENELOPE - Êtes-vous bien certain que c'était lui ?

    ULYSSE- Eh bien, Madame, il se faisait appeler Ulysse. Il était accompagné de son beau-frère, je crois... Euryloque ?  ( L'imitant ) Un homme assez agaçant. Et puis je me souviens aussi... Il avait une magnifique agrafe en or, représentant un jeune chien avec un faon entre ses pattes.

    PENELOPE- Cette agrafe,  étranger , c'est moi qui la lui avait offerte, le jour de son départ ! Je voulais qu'il soit beau , je pensais qu'il reviendrait vite,  chargé d'honneurs de trésors...

    Ulysse se retourne vers Euryclée.

    ULYSSE-Qu'est-ce qu'il vous arrive,pourquoi vous vous arrêtez ?

    EURYCLEE- Monsieur, votre cicatrice... C'est la même que celle d'Ulysse, celle qu'il a eue à la chasse au sanglier. Je m'en souviens, je l'ai soignée moi- même. Monsieur, soit vous avez la jambe d'Ulysse, soit vous êtes...

    (LENNY)

    ULYSSE - Chut ! Tais - toi malheureuse !

    EURYCLEE - C'est vous, monsieur ! C'est bien vous ! Et Madame Pénélope qui ne doute de rien !

    Pénélope est dans ses pensées et parle pour elle-même.

    PENELOPE - Et il avait la barbe très douce, vous savez, il en prenait beaucoup soin... Et puis...

    ULYSSE - Oui, c'est moi. Mais chut, je t'en supplie !

    EURYCLEE- Oh, mon enfant, c'est toi, c'est vraiment toi! Mais pourquoi te cacher, pourquoi rentrer chez toi comme un étranger ?

    ULYSSE- Parce que si je m'annonçais,je ne passerais même pas le seuil. Je serais assassiné sur le champ !Ainsi, je peux préparer mon retour, et si possible ma vengeance... je suis content de te voir, moi aussi. et merci pour le bain. Dame Pénélope ?

    PENELOPE- Et le matin il m'embrassait dans le cou pour me réveiller...

    ULYSSE-Madame ?

    PENELOPE- Uh ? Oh pardon, j'étais...

    ULYSSE- Vous étiez avec lui, Madame, j'ai vu. Et vous le serez bientôt de nouveau, je vous l'assure. Voilà ma réponse à vos questions. Des gens l'ont vu, il sera bientôt là. Tout son équipage est mort , il rentre seul, mais il rentre. Ulysse revient, Madame.

    PENELOPE- J'aimerais que vous ayez raison, Étranger. Je vous remercie de m'avoir  replongée dans ces souvenirs, mais ils m'ont épuisée. (Elle se lève ) .Je crois qu'il est temps d'en terminer avec tout ça. Demain, j'organiserai un grand concours pour départager les prétendants. Avec un peu de chance, ils échoueront tous. Sinon , j'aurai demain soir un nouvel époux... Bonne nuit , étranger. Bonne nuit Euryclée.

    Elle sort.

    EURYCLEE- Tu ne vas pas laisser faire ça, hein mon enfant ?

    ULYSSE- Non enfin , si, peut-être... 

    (LOUJEYNE)

    15 Le Concours de l'arc

    PENELOPE - Messieurs, voici l'arc qui appartenait à Ulysse. S'il en est un parmi vous dont les mains peuvent le tendre et, comme lui, traverser d'une seul flèche douze haches alignées, alors je le suivrai vers ma nouvelle maison .

    ANTINOOS - Ha ! La belle arnaque ! Je ne crois pas que quiconque d'autre qu'Ulysse ait jamais réussi à le bander ni même à le tendre ! Si vous croyez vous en sortir avec ça, comme avec votre linceul, vous vous fourrez le doigt dans l’œil jusqu'à l'omoplate , Pénélope! Si on échoue tous on sera encore là demain . Enfin ,ça  vaut toujours le coup d'essayer et ça animera un peu la matinée.Bon ,qui y va en premier ?

    Il s'assoit en position d'ennui .

    Non, mais c'est bon là,on s'ennuie !Ça fait quatre heures qu'on essaye et on n'a toujours pas réussi à attacher la corde à l'arc ! Qu'est-ce qu'on fait ,on prend une pause ou quelqu'un d'autre se la tente ? 

    ULYSSE - A moi . Je vais essayer.

    ANTINOOS- Tu ne vas rien essayer du tout , vieux pouilleux ! Pour qui est-ce que tu prends ? On t'accueille , on te nourrit , on te loge , tu écoutes nos conversations et tu voudrais en plus épouser la reine ?! 

    PENELOPE- Antinoos , je tiens à ce qu'on respecte mes invités , à défaut de moi -même . Prenez votre tour , Étranger . Si vous réussissez , je vous offre habits neufs armes et sandales pour quand vous reprendrez votre route . 

    (NATHAN)

    TELEMAQUE - C'est une excellente idée , maman .Mais tu as l'air épuisée,si tu allais te reposer ? Je te préviendrai s'il y parvient .

    PENELOPE- Tu as raison ,Télémaque .Bonne chance, Etranger . ANTINOOS- T'as vraiment  un culot pas possible,sale chien... De toute façon  tu n'y arriveras jamais.Messieurs, regardons tous ce clodo se ridiculiser! Il n'y a  aucune chance pour que ...La vache ! Mais comment t'as fait ça?! Silence. Ulysse tend l'arc sans effort et tire la flèche dans les douze haches qu'elle traverse . Les prétendants sont pétrifiés.

    ULYSSE- Qu'en dis - tu , Télémaque ? Ai-je mérité toutes ces insultes ?

    ANTINOOS - Mais sérieux , mais  tu es qui , nom des di...

    Antinoos est interrompu par une  flèche en travers de la gorge . Il s'effondre .

    ULYSSE- Qui je suis ?! Je suis celui qui est mort cent fois et que vous avez enterré dans vos cœurs! Celui que vous avez pillé , sali, profané et humilié! 

    Je suis Ulysse, je suis de retour et je suis votre mort !

    Ulysse s'élance au combat.

    Noir.

    (ADRIEN)

    16-La reconnaissance d'Ulysse par Pénélope

    Euryclée entre précipitamment.

    EURYCLEE- Madame ! Madame ! Réveillez-vous, Madame ! Il est là, Madame, il est là!

    PENELOPE- Arrête de crier, Euryclée je t'en prie...

    EURYCLEE- Il est là, Madame, il est de retour ! Il a tué les prétendants, il reprend sa maison !

    PENELOPE- Mais qui ? De quoi, de qui parles-tu?

    EURYCLEE- Ulysse, Madame, Ulysse!

    PENELOPE- Ne raconte pas n'importe quoi, par pitié. Je dormais, Euryclée. Et pour la première fois depuis son départ, je dormais bien.

    EURYCLEE- Je vous en supplie, Madame, suivez-moi, venez le voir!

    Pénélope se lève pour la suivre.

    PENELOPE- Mais enfin Euryclée, qu'est-ce qui te prend... ?

    Elle sort puis entre précipitamment dans la grand salle du palais et s'arrête, en hésitation. Elle et Ulysse se regardent longuement, elle drapée dans sa dignité et lui essoufflé du combat.

    PENELOPE- On m'a dit qui tu prétends être. Et je dois reconnaître que tu lui ressembles, maintenant. Tu lui ressembles, maintenant. Tu ressembles à celui qu'il doit être aujourd'hui. Je te préviens que tu n'es pas Ulysse, que si tu es un tour des dieux, du sort ou une imposture, je ferai tout pour que tu ne sortes pas d'ici vivant, as-tu bien compris?

    ULYSSE- Pénélope, écoute moi...

    (KAYLINE)

    PENELOPE - Je suis prête à te tuer et à me tuer ensuite,mais je ne te laisserai pas me voir ainsi tremblante d'espoir et vivre pour  le raconter ensuite à qui voudra bien t'entendre...

    ULYSSE- C'est moi, Pénélope,c'est vraiment moi.Je le te jure .

    PENELOPE - C'est vraiment toi ?Ulysse !

    Ils se courent dans les bras et s'étreignent.

    ULYSSE - Pénélope !

    Pénélope se dégage de son étreinte .

    PENELOPE - Où étais-tu ? Où étais-tu,bougre d'imbécile,pendant 20 ans ?

    ULYSSE - J'étais partout,jusqu'aux enfers ! Tu m'as tellement manqué !

    Il prend le visage de Pénélope entre ses mains ,ils s'étreignent de nouveau .

    PENELOPE - J'ai cru devenir folle !Je suis devenu folle...Mais tu es là,maintenant.Tu es là hein ?

    ULYSSE - Oui.Oui,je suis là,je te le jure.Je t'aime.

    PENELOPE - Je t'aime. Tu me racontes ?

    ULYSSE - Toi d'abord.

    Noir.Fin.