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Odyssée scènes 4 & 5
4 – Le palais d’Alkinoos
ALKINOOS – Chers amis, Étranger, levons ensemble nos verres à la santé de Zeus le Brandisseur de Foudre, qui t’a amené jusqu’ici. (Il boit) Mange, étranger. Cette table est la tienne tant que tu resteras parmi nous. Et dès demain, nous te raccompagnerons chez toi.
ULYSSE – Merci Alkinoos ô roi. Et merci à toi aussi, ô Reine. J’espère pouvoir un jour vous remercier comme il convient.
ALKINOOS – Je t’en prie, Étranger. Nous feras-tu le plaisir de nous raconter qui tu es et comment tu t’es naufragé sur nos côtes ?
ULYSSE – C’est une longue histoire. Mais puisque tu me la demandes… Alors que je rentrais chez moi il y a bien longtemps, Zeus a frappé mon navire et noyé tous mes camarades.
Ulysse boit à l’évocation de ce souvenir douloureux.
J’ai dérivé neuf jours, accroché à des décombres du bateau, jusqu’à une île isolée de tout. C’est là qu’habite la déesse Calypso, fille du titan Atlas. Elle m’a recueilli, soigné et m’a promis de faire de moi un immortel si je restais à ses côtés. Je crois qu’elle se sentait seule. J’y suis resté sept ans. Sept longues années pendant lesquelles je n’ai pensé qu’à une chose : retrouver mon pays et ma femme. Et puis il y a une vingtaine de jours, elle est venue me trouver sur la plage. J’étais en train de… de faire de l’exercice…
Je ne sais pas ce qui l’a faite changer d’avis, mais elle m’a libéré. Alors j’ai fabriqué un radeau et je suis parti. En approchant de vos côtes, une autre tempête m’a naufragé. (Il boit à nouveau) Parce qu’apparemment ma vie se résume à ça : tempêtes et captivité chez des immortelles. Non parce qu’avant elle il y en a eu une autre ! Bref j’ai trouvé un abri dans des broussailles et au petit matin, c’est ta fille Nausicaa qui m’a réveillé. Elle m’a conseillé de venir te voir, elle a été vraiment très sympa.
ALKINOOS – Ah, je reconnais bien là notre petite Nausicaa ! Douce et prévenante, n’est-ce pas ? Mais pourquoi ne t’a-t-elle pas raccompagné elle-même avec ses servantes ?
ULYSSE – Eh bien, elle me l’a proposé, mais j’ai refusé. Pour qu’elle ne soit pas vue avec un homme, tu comprends ?
ALKINOOS – Tu es un homme bon, étranger, tu es un homme bon… Si tu restais, elle pourrait être ta femme ! Tu obtiendrais mes richesses, mon palais, tout Phéacie !
ULYSSE – Eh oui ! Et merci pour ta prévenance Alkinoos, ô roi, mais – et je ne sais pas pourquoi tout le monde a l’air de l’oublier… - j’ai déjà un pays et une femme. Et je ne souhaite rien de plus que les retrouver. Et puis, entre nous...C’est-à-dire que Nausicaa a quatorze ans, tout de même !
ALKINOOS – Oui, pardon, pardon ! C’est juste que je pense beaucoup à son avenir, quoi…
ULYSSE – Oui d’accord, mais alors moi ça me met très, très mal à l’aise en fait !
ALKINOOS – Pardon ! Pardon, je ne recommencerai plus !
ULYSSE – Voilà, merci !
ALKINOOS – Ahaha…
ULYSSE – Ahaha…
Ils rient ensemble, plutôt jaune… Puis avec un enthousiasme un peu poussé :
ALKINOOS – Ahem, tiens, euh, étranger, si on mettait un peu de musique ? Je te présente Démodocos, l’aède le plus célèbre de tout le pays.
DEMODOCOS – Okay ! Salut les Phéaciens, ça me fait plaisir de vous retrouver ! Comment ça va ? J’ai dit est-ce que ça va ? Okay ! Alors on commence avec un bon vieux classique parce que je sais que vous aimez ça. Elle s’appelle Prudence et Bravoure…
5 – La Chanson de Démodocos
DEMODOCOS -
Ils n’étaient pas amis, ni ennemis non plus
Ils avaient bien été rivaux mais ils n’en parlaient plus
Avant tout camarades, ils étaient dans le même camp
Mais bien que frères d’armes tout les opposait pourtant
L’un ét ait un colosse, pas vraiment imbécile
Pas franchement Socrate non plus, il s’appelait Achille
Baigné dans les eaux du Styx aux enfers étant garçon
Il était invulnérable, n’eut été d’un arpion
L’autre avait bien aussi sa part de force destructrice
Quoiqu’il misait tout sur la ruse, on l’appelait Ulysse
Futé et insolent, il préférait s’armer
D’idées, de mots, de stratagèmes plutôt qu’épée
C’est sur l’île de Lesnos que nos deux compagnons
Au cours d’un banquet, faillirent en venir aux gnons
Devant l’armée grecque réunie, tour à tour
L’un célébrait Prudence, et l’autre louait Bravoure
Incapables de se convaincre, ils quittèrent la partie
Se promettant l’un l’autre qu’un jour ils seraient séduits
Puis ils partirent au front mener le long siège de Troie
Oublier leur querelle dans le sang et les combats
Au bout de dix ans, tant de frères furent tombés
Que plus personne n’imaginait voir cette guerre s’achever
Achille détenait le record d’ennemis occis
Ulysse cherchait encore une issue à cette boucherie
Un matin une flèche par Pâris décochée
Cueillit Achille à la cheville, on le vit s’effondrer
Les combats cessèrent dans un silence tendu
Et on pleura pendant des jours le héros disparu
Privée de sa légende, de son plus grand guerrier
L’armée d’Agamemnon semblait désemparée
Quand une voix s’éleva, c’était celle d’Ulysse
Qui laissa parler la ruse, fit un nouvel artifice
Il imagina un immense cheval tout fait de bois
Offert en signe de paix à la ville de Troie
Qui ravie que cette guerre de dix ans soit finie
Accepta le présent et fêta toute la nuit
La cité d’Ilion signa ainsi la défaite
Portant entre ses murs l’origine de sa perte
Dans les flancs du cheval une armée attendait fébrile
L’heure de conquérir enfin cette ville indocile
Le soleil se leva sur les cendres et la fumée
Sans vraiment se défendre, Troie était tombée
Ville mise à sac, hommes abattus, femmes enlevées
De cette épreuve jamais elle ne put se relever
La dépouille d’Achille y resta pour toujours
Ulysse jamais à Ithaque ne fut de retour
La querelle de Lesnos avait trouvé sa conclusion
Bravoure et prudence ne peuvent être que de front
Elles n’étaient pas amies, ni ennemies non plus
Aujourd’hui Prudence et Bravoure ont toutes deux disparu
Personne ne les a depuis jamais revues
Bravoure et Prudence ont toutes les deux disparu (x3)
Merci, c’était Démodocos ! Allez on se retrouve après le dessert, je serai à la sortie pour dédicacer de petites tablettes de cire !